TEXTE 1 : Priorité de la pensée des objets dans la perception
"Or quelle est cette cire, qui ne peut être conçue que par l'entendement ou l'esprit ? Certes c'est la même que je vois, que je touche, que j'imagine, et la même que je connaissais dès le commencement. Mais ce qui est à remarquer, sa perception, ou bien l'action par laquelle on l'aperçoit, n'est point une vision, ni un attouchement, ni une imagination, et ne l'a jamais été, quoiqu'il le semblât ainsi auparavant, mais seulement une inspection de l'esprit, laquelle peut être imparfaite et confuse, comme elle était auparavant, ou bien claire et distincte, comme elle est à présent, selon que mon attention se porte plus ou moins aux choses qui sont en elle, et dont elle est composée. (...) Nous disons que nous voyons la même cire si on nous la présente, et non pas que nous jugeons que c'est la même, de ce qu'elle a même couleur et même figure; d'où je voudrais presque conclure, que l'on connait la cire par la vision des yeux, et non par la seule inspection de l'esprit, si par hasard je ne regardais d'une fenêtre des hommes qui passent dans la rue, à la vue desquels je ne manque pas de dire que je vois des hommes, tout de même que je dis que je vois de la cire, et cependant que vois-je de cette fenêtre sinon des chapeaux et des manteaux, qui peuvent couvrir des spectres ou des hommes feints qui ne se remuent que par ressorts, mais je juge que ce sont de vrais hommes; et ainsi je comprends par la seule puissance de juger qui réside en mon esprit, ce que je croyais voir de mes yeux." (Descartes, Méditations métaphysiques
TEXTE 2 La perception est une sélection
" Vivre consiste à agir. Vivre, c'est n'accepter des objets que l'impression utile pour y répondre par des réactions appropriées : les autres impressions doivent s'obscurcir ou ne nous arriver que confusément. Je regarde et je crois voir, j'écoute et je crois entendre, je m'étudie et je crois lire dans le fond de mon cœur. Mais ce que je vois et ce que j'entends du monde extérieur, c'est simplement ce que mes sens en extraient pour éclairer ma conduite ; ce que je connais de moi-même, c'est ce qui affleure à la surface, ce qui prend part à l'action. Mes sens et ma conscience ne me livrent donc de la réalité qu'une simplification pratique. Dans la vision qu'ils me donnent des choses et de moi-même, les différences inutiles à l'homme sont effacées, les ressemblances utiles à l'homme sont accentuées, des routes me sont tracées à l'avance où mon action s'engagera. Ces routes sont celles où l'humanité entière a passé avant moi. Les choses ont été classées en vue du parti que j'en pourrai tirer. Et c'est cette classification que j'aperçois, beaucoup plus que la couleur et la forme des choses. Sans doute l'homme est déjà très supérieur à l'animal sur ce point. Il est peu probable que l'œil du loup fasse une différence entre le chevreau et l'agneau ; ce sont là, pour le loup, deux proies identiques, étant également faciles à saisir, également bonnes à dévorer. Nous faisons, nous, une différence entre la chèvre et le mouton ; mais distinguons-nous une chèvre d'une chèvre, un mouton d'un mouton ? L'individualité des choses et des êtres nous échappe toutes les fois qu'il ne nous est pas matériellement utile de l'apercevoir. Et là même où nous la remarquons (comme lorsque nous distinguons un homme d'un autre homme), ce n'est pas l'individualité même que notre œil saisit, c'est-à-dire une certaine harmonie tout à fait originale de formes et de couleurs, mais seulement un ou deux traits qui faciliteront la reconnaissance pratique." Bergson, Le Rire.
TEXTE 3 Ce qui détermine notre attention
« Il me paraît donc vraisemblable que la conscience, originellement immanente à tout ce qui vit, s'endort là où il n'y a plus de mouvement spontané, et s'exalte quand la vie s'appuie vers l'activité libre. Chacun de nous a d'ailleurs pu vérifier cette loi sur lui-même. Qu'arrive-t-il quand une de nos actions cesse d'être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s'en retire. Dans l'apprentissage d'un exercice, par exemple, commençons à être conscient de chacun de ces mouvements que nous exécutons, parce qu'il vient de nous, parce qu'il résulté d'un décision et implique un choix ; puis à mesure que ces mouvements s'enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d'autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l'aurons fait ? Les variations d'intensité de notre conscience semblent donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous le voulez de création, que nous distribuons sur notre conduite. » Bergson L’Energie spirituelle
TEXTE 4 Le comportement révèle la perception comme une façon d’être au monde
Le comportement en tant qu'il a une structure ne prend place dans aucun de ces deux ordres. il ne se déroule pas dans le temps et dans l'espace objectifs, comme une série d'événements physiques, chaque moment n’y occupe pas un point et un seul du temps, mais au moment décisif de l'apprentissage, un « maintenant » sort de la série des « maintenant » acquiert une valeur particulière, résume les tâtonnements qui l'ont précédé comme il engage et anticipe l'avenir du comportement, transforme la situation singulière de l'expérience en une situation typique et la réaction affective en une aptitude. À partir de ce moment le comportement se détache de l'ordre de l’en-soi et devient la projection hors de l'organisme d'une possibilité qui lui est intérieure. Le monde, en tant qu'il porte des êtres vivants, cesse d'être une matière plein de parties juxtaposées, il se creuse à l'endroit où apparaissent des comportements. Il ne servirait à rien de dire que c'est nous spectateurs qui réunissons par la pensée les éléments de la situation auquel le comportement s'adresse, pour en faire un sens, que c'est nous qui projetons dans l'extérieur les intentions de notre pensée, puisqu'il resterait à savoir quel signe nous invite à l'anthropomorphisme. Il ne servirait à rien non plus de dire que le comportement « est conscient » et qu'il nous révèle comme son envers un autre pour-soi caché derrière le corps visible. Les gestes du comportement, les intentions qu'il trace dans l'espace autour de l'animal, ne visent pas le monde vrai ou l’être pur mais l’être-pour-l'animal c'est-à-dire un certain milieu caractéristique de l'espèce, ils ne laissent pas transparaître une conscience c'est-à-dire un être dont toute l’essence est de connaître mais une certaine manière de traiter le monde, « d'être au monde » ou d'exister. Merleau Ponty, La structure du comportement.
TEXTE 5 L’illusion comme prévalence du désir
"Quand je dis : tout cela, ce sont des illusions, il me faut délimiter le sens de ce terme. Une illusion n'est pas la même, chose qu'une erreur, une illusion n'est pas non plus nécessairement une erreur. L'opinion d'Aristote, d'après laquelle la vermine serait engendrée par l'ordure — opinion qui est encore celle du peuple ignorant —, était une erreur (…) Il serait impropre d'appeler ces erreurs des illusions, alors que c'était une illusion de la part de Christophe Colomb, quand il croyait avoir trouvé une nouvelle route maritime des Indes. La part de désir que comportait cette erreur est manifeste. On peut qualifier d'illusion l'assertion de certains nationalistes, assertion d'après laquelle les races indogermaniques seraient les seules races humaines susceptibles de culture, ou bien encore la croyance d'après laquelle l'enfant serait un être dénué de sexualité, croyance détruite pour la première fois par la psychanalyse. Ce qui caractérise l'illusion, c'est d'être dérivée des désirs humains ; elle se rapproche par là de l'idée délirante en psychiatrie, mais se sépare aussi de celle-ci, même si l'on ne tient pas compte de la structure compliquée de l'idée délirante. L'idée délirante est essentiellement — nous soulignons ce caractère — en contradiction avec la réalité ; l'illusion n'est pas nécessairement fausse, c'est-à-dire irréalisable ou en contradiction avec la réalité. Une jeune fille de condition modeste peut par exemple se créer l'illusion qu'un prince va venir la chercher pour l'épouser. Or ceci est possible ; quelques cas île ce genre se sont réellement présentés. Que le Messie vienne et fonde un âge d'or, voilà qui est beaucoup moins vraisemblable : suivant l'attitude personnelle de celui qui est appelé à juger de cette croyance, il la classera parmi les illusions ou parmi les équivalents d'une idée délirante. Des exemples d'illusions authentiques ne sont pas, d'ordinaire, faciles à découvrir ; mais l'illusion des alchimistes de pouvoir transmuter tous les métaux en or est peut-être l'une d'elles. Le désir d'avoir beaucoup d'or, autant d'or que possible a été très atténué par notre intelligence actuelle des conditions de la richesse ; cependant la chimie ne tient plus pour impossible une transmutation des métaux en or. Ainsi nous appelons illusion une croyance quand, dans la motivation de celle-ci, la réalisation d'un désir est prévalente, et nous ne tenons pas compte, ce faisant, des rapports de cette croyance à la réalité, tout comme l'illusion elle-même renonce à être confirmée (ou non) par le réel." Freud L’avenir d’une illusion.
TEXTE 6 La confiance dans le monde est déterminée par notre rapport au monde
Quand je perçois, je ne pense pas le monde, il s'organise devant moi. Quand je perçois un cube, ce n'est pas que ma raison redresse les apparences perceptives et pense à propos d'elles la définition géométrique du cube. Loin que je les corrige, je ne remarque pas même les déformations perceptives, à travers ce que je vois je suis au cube lui-même dans son évidence. Et de même les objets derrière mon dos ne me sont pas représentés par quelque opération de la mémoire ou du jugement, ils me sont présents, ils comptent pour moi, comme le fond que je ne vois pas n'en continue pas moins d'être présent sous la figure qui le masque en partie. Même la perception du mouvement, qui d'abord paraît dépendre directement du point de repère que l'intelligence choisit, n'est à son tour qu'un élément dans l'organisation globale du champ. Car s'il est vrai que mon train et le train voisin peuvent tour à tour m'apparaître en mouvement au moment où l'un d'eux démarre, il faut remarquer que l'illusion n'est pas arbitraire et que je ne puis la provoquer à volonté par le choix tout intellectuel et désintéressé d'un point de repère. Si je joue aux cartes dans mon compartiment, c'est le train voisin qui démarre. Si, au contraire, je cherche des yeux quelqu'un dans le train voisin, c'est alors le mien qui démarre. À chaque fois nous apparaît fixe celui des deux où nous avons élu domicile et qui est notre milieu du moment. Le mouvement et le repos se distribuent pour nous dans notre entourage, non pas selon les hypothèses qu'il plaît à notre intelligence de construire, mais selon la manière dont nous nous fixons dans le monde et selon la situation que notre corps y assume. Tantôt je vois le clocher immobile dans le ciel et les nuages qui volent au-dessus de lui - tantôt au contraire les nuages semblent immobiles et le clocher tombe à travers l'espace, mais ici encore le choix du point fixe n'est pas le fait de l'intelligence: l'objet que je regarde et où je jette l'ancre m'apparaît toujours fixe et je ne puis lui ôter cette signification qu'en regardant ailleurs. Je ne la lui donne donc pas non plus par la pensée. La perception n'est pas une sorte de science commençante, et un premier exercice de l'intelligence, il nous faut retrouver un commerce avec le monde et une présence au monde plus vieux que l'intelligence. Merleau Ponty Sens et non sens.
TEXTE 7 L'allégorie de la caverne
SOCRATE (S) - Maintenant, représente-toi notre nature selon qu'elle a été
instruite ou ne l'a pas été, sous des traits de ce genre: imagine des hommes dans une demeure souterraine, une caverne, avec une large entrée, ouverte dans toute sa longueur à la lumière: ils
sont là les jambes et le cou enchaînés depuis leur enfance, de sorte qu'ils sont immobiles et ne regardent que ce qui est devant eux, leur chaîne les empêchant de tourner la tête. La lumière leur
parvient d'un feu qui, loin sur une hauteur, brûle derrière eux; et entre le feu et les prisonniers s'élève un chemin en travers duquel imagine qu'un petit mur a été dressé, semblable aux
cloisons que des montreurs de marionnettes placent devant le public, au-dessus desquelles ils font voir leurs marionnettes.
GLAUCON (G) - Je vois.
S. - Imagine le long du mur des hommes qui portent toutes sortes d'objets qui dépassent le mur; des statuettes d'hommes et d'animaux, en pierre, en bois, faits de toutes sortes de matériaux;
parmi ces porteurs, naturellement il y en a qui parlent et d'autres qui se taisent.
G. - Voilà un étrange tableau et d'étranges prisonniers.
S. - Ils nous ressemblent. Penses-tu que de tels hommes aient vu d'eux-mêmes et des uns et des autres, autre chose que les ombres projetées par le feu sur la paroi de la caverne qui leur fait
face?
G. - Comment cela se pourrait-il, en effet, s'ils sont forcés de tenir la tête immobile pendant toute leur vie?
S. - Et pour les objets qui sont portés le long du mur, est-ce qu'il n'en sera pas de même?
G. - Bien sûr.
S. - Mais, dans ces conditions, s'ils pouvaient se parler les uns aux autres, ne penses-tu pas qu'ils croiraient nommer les objets réels eux-mêmes en nommant ce qu'ils voient?
G. - Nécessairement.
S. - Et s'il y avait aussi dans la prison un écho que leur renverrait la paroi qui leur fait face? Chaque fois que l'un de ceux qui se trouvent derrière le mur parlerait, croiraient-ils entendre
une autre voix, à ton avis, que celle de l'ombre qui passe devant eux?
G. - Ma foi non.
S. - Non, de tels hommes ne penseraient absolument pas que la véritable réalité puisse être autre chose que les ombres des objets fabriqués.
G. - De toute nécessité.
S. - Envisage maintenant ce qu'ils ressentiraient à être délivrés de leurs chaînes et à être guéris de leur ignorance, si cela leur arrivait, tout naturellement, comme suit: si l'un d'eux était
délivré et forcé soudain de se lever, de tourner le cou, de marcher et de regarder la lumière; s'il souffrait de faire tous ces mouvements et que, tout ébloui, il fût incapable de regarder les
objets dont il voyait auparavant les ombres, que penses-tu qu'il répondrait si on lui disait que jusqu'alors il n'a vu que des futilités mais que, maintenant, plus près de la réalité et tourné
vers des êtres plus réels, il voit plus juste; lorsque, enfin, en lui montrant chacun des objets qui passent, on l'obligerait à force de questions à dire ce que c'est, ne penses-tu pas qu'il
serait embarrassé et trouverait que ce qu'il voyait auparavant était plus véritable que ce qu'on lui montre maintenant?
G. - Beaucoup plus véritable.
S. - Si on le forçait à regarder la lumière elle-même, ne penses-tu pas qu'il aurait mal aux yeux, qu'il la fuirait pour se retourner vers les choses qu'il peut voir et les trouverait vraiment
plus distinctes que celles qu'on lui montre?
G. - Si.
S. - Mais si on le traînait de force tout au long de la montée rude, escarpée, et qu'on ne le lâchât pas avant de l'avoir tiré dehors à la lumière du soleil, ne penses-tu pas qu'il souffrirait et
s'indignerait d'être ainsi traîné; et que, une fois parvenu à la lumière du jour, les yeux pleins de son éclat, il ne pourrait pas discerner un seul des êtres appelés maintenant véritables?
G. - Non, du moins pas sur le champ.
S. - Il aurait, je pense, besoin de s'habituer pour être en mesure de voir le monde d'en haut. Ce qu'il regarderait le plus facilement d'abord, ce sont les ombres, puis les reflets des hommes et
des autres êtres sur l'eau, et enfin les êtres eux-mêmes. Ensuite il contemplerait plus facilement pendant la nuit les objets célestes et le ciel lui-même - en levant les yeux vers la lumière des
étoiles et de la lune - qu'il ne contemplerait, de jour, le soleil et la lumière du soleil.
G. - Certainement.
S. - Finalement, je pense, c'est le soleil, et non pas son image dans les eaux ou ailleurs, mais le soleil lui-même à sa vraie place, qu'il pourrait voir et contempler tel qu'il est.
G. - Nécessairement.
S. - Après cela il en arriverait à cette réflexion, au sujet du soleil, que c'est lui qui produit les saisons et les années, qu'il gouverne tout dans le monde visible, et qu'il est la cause,
d'une certaine manière, de tout ce que lui-même et les autres voyaient dans la caverne.
G. - Après cela, il est évident que c'est à cette conclusion qu'il en viendrait.
S. - Mais quoi, se souvenant de son ancienne demeure, de la science qui y est en honneur, de ses compagnons de captivité, ne penses-tu pas qu'il serait heureux de son changement et qu'il
plaindrait les autres?
G. - Certainement.
S. - Et les honneurs et les louanges qu'on pouvait s'y décerner mutuellement, et les récompenses qu'on accordait à qui distinguait avec le plus de précision les ombres qui se présentaient, à qui
se rappelait le mieux celles qui avaient l'habitude de passer les premières, les dernières, ou ensemble, et à qui était le plus capable, à partir de ces observations, de présager ce qui devait
arriver: crois-tu qu'il les envierait? Crois-tu qu'il serait jaloux de ceux qui ont acquis honneur et puissance auprès des autres, et ne préférerait-il pas de loin endurer ce que dit Homère:
"être un valet de ferme au service d'un paysan pauvre", plutôt que de partager les opinions de là-bas et de vivre comme on y vivait.
G. - Oui, je pense qu'il accepterait de tout endurer plutôt que de vivre comme il vivait.
S. - Et réfléchis à ceci: si un tel homme redescend et se rassied à la même place, est-ce qu'il n'aurait pas les yeux offusqués par l'obscurité en venant brusquement du soleil?
G. - Si, tout à fait.
S. - Et s'il lui fallait à nouveau donner son jugement sur les ombres et rivaliser avec ces hommes qui ont toujours été enchaînés, au moment où sa vue est trouble avant que ses yeux soient remis
- cette réaccoutumance exigeant un certain délai - ne prêterait-il pas à rire, ne dirait-on pas à son propos que pour être monté là-haut, il en est revenu les yeux gâtés et qu'il ne vaut même pas
la peine d'essayer d'y monter; et celui qui s'aviserait de les délier et de les emmener là-haut, celui-là s'ils pouvaient s'en emparer et le tuer, ne le tueraient-ils pas?
G. - Certainement.
S. - Ce tableau, il faut l'appliquer entièrement à ce qu'on a dit auparavant: en assimilant le monde visible au séjour de la prison, et la lumière du feu au rayonnement du soleil. Et si tu poses que la montée et la contemplation des réalités d'en haut représentent l'ascension de l'âme vers le monde intelligible, tu ne te tromperas pas sur ma pensée, puisque tu désires la connaître; et Dieu sais si elle est vraie. Voici comment les choses se présentent pour moi: à l'extrémité du monde intelligible, est l'idée du Bien, qui peut à peine être contemplée mais qu'on ne peut voir sans conclure qu'elle est bien la cause de tout ce qu'il y a de rectitude et de beauté dans le monde: dans le monde visible, elle engendre la lumière et sa source souveraine, et dans le monde intelligible, souveraine, elle dispense intelligence et vérité; et c'est elle qu'il faut contempler pour agir sagement dans la vie privée comme dans la vie publique.